Washington — Le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, a haussé le ton hier à propos de Jérusalem, faisant apparemment peu de cas du mécontentement du président américain, Barack Obama, qui l'a ensuite accueilli pour un dîner de travail à la Maison-Blanche.

M. Nétanyahou avait planté le décor de la rencontre en prévenant des journalistes que «si les Américains soutiennent les demandes déraisonnables présentées par les Palestiniens concernant un gel de la construction à Jérusalem, le processus politique risque d'être bloqué pendant un an».

Et hier en fin de journée, on apprenait que la municipalité de Jérusalem a donné son feu final à la construction de 20 logements à l'emplacement d'un hôtel palestinien à Jérusalem-Est, selon plusieurs médias israéliens. Selon la radio publique ainsi que le site Internet Ynet, la municipalité de Jérusalem a donné toutes les autorisations nécessaires pour la destruction de l'hôtel Shepherd dans le quartier palestinien de Sheikh Jarrah pour permettre la construction de 20 logements destinés à des familles israéliennes.

Ce projet a été lancé par le millionnaire juif Irving Moskowitz, qui finance plusieurs organisations ultranationalistes dont le but déclaré est d'encourager l'installation d'Israéliens dans des quartiers arabes de Jérusalem-est qu'Israël a annexés.


Une capitale

«Le peuple juif a construit Jérusalem il y a 3000 ans et le peuple juif construit Jérusalem aujourd'hui», avait lancé Nétanyahou lundi devant l'AIPAC, le principal groupe d'influence américain pro-Israël réuni en congrès à Washington. «Jérusalem n'est pas une colonie. C'est notre capitale», avait-il insisté.

Ces déclarations menacent les efforts américains pour relancer le processus de paix, a réagi hier l'Autorité palestinienne.

L'État hébreu s'est emparé de Jérusalem-Est lors de la guerre des six jours en 1967, avant une annexion que la communauté internationale n'a pas reconnue. Les Palestiniens veulent faire de cette partie de la Ville Sainte leur future capitale.

La position de M. Nétanyahou, habituelle de la part du chef de gouvernement israélien, prend un sens différent dans le contexte de la forte tension entre Israël et les États-Unis. Son discours «creuse le fossé entre l'administration Obama et le gouvernement israélien à propos de Jérusalem et des négociations», estime Haim Malka, du Centre d'études stratégiques et internationales (CSIS) à Washington.

La crise a éclaté il y a deux semaines, quand le gouvernement Netanyahu a annoncé 1600 nouvelles constructions à Jérusalem-Est, en pleine visite du vice-président américain Joe Biden. Washington a argué que cette initiative n'était pas seulement néfaste pour la paix, mais aussi pour la crédibilité des efforts américains afin de regagner la confiance du monde arabe, et isoler l'Iran.


Satisfaction

Côté israélien, le secrétaire du cabinet de M. Nétanyahou a affiché la satisfaction de ce dernier après ses premiers entretiens à Washington. «Les relations entre Israël et les États-Unis sont inchangées», a expliqué Zvi Hauser. Quant au désaccord à propos de Jérusalem, il «remonte à 1967, et il s'agit de divergences entre amis».

Le différend entre les alliés sur la Ville sainte «a été glissé sous le tapis pendant de très nombreuses années, mais ce n'est plus le cas», juge pourtant Michelle Dunne, de la fondation Carnegie, en rappelant l'appel lancé aux deux parties par la secrétaire d'État, Hillary Clinton, pour qu'elles «discutent de bonne foi» du statut de la ville.

«La seule façon de résoudre la question de Jérusalem est de retourner à la table des négociations», a insisté à la mi-journée Philip Crowley, le porte-parole de la diplomatie américaine.

Le premier ministre israélien, fin connaisseur de la politique américaine, a enregistré dans la matinée le soutien du Congrès. «Nous, au Congrès, nous sommes aux côtés d'Israël. C'est un point sur lequel nous avons un engagement au-delà des clivages partisans», a assuré la présidente de la Chambre des représentants américaine, Nancy Pelosi, qui s'exprimait en présence du chef de la minorité républicaine, John Boehner, en recevant M. Nétanyahou au Capitole.