New York -- L'Assemblée générale de l'ONU a adopté hier à une très large majorité une résolution demandant qu'Israël et les Palestiniens ouvrent des enquêtes «crédibles» sur les allégations de crimes de guerre commis lors du conflit de Gaza l'hiver dernier.


La résolution, déposée par les pays arabes et non alignés, a recueilli 114 voix contre 18, avec 44 abstentions.


Les États-Unis ont voté contre, la Russie s'est abstenue et l'Union européenne a voté en ordre dispersé.

La résolution «approuve» le rapport controversé de la commission Goldstone et demande à Israël et aux Palestiniens d'ouvrir dans les trois mois des enquêtes «indépendantes, crédibles et conformes aux critères internationaux» sur les «graves violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme dont fait état le rapport».


Elle exprime la volonté de l'Assemblée de faire le point au bout de trois mois sur l'application de la résolution, «en se réservant la possibilité de saisir d'autres organes pertinents de l'ONU, dont le Conseil de sécurité».


Le vote a conclu un débat de deux jours à l'Assemblée plénière de l'ONU, sur les conclusions du rapport du juge sud-africain Richard Goldstone. Ce rapport accuse Israël et les Palestiniens de «crimes de guerre» et de «possibles crimes contre l'humanité» lors de l'offensive militaire israélienne à Gaza en décembre-janvier.


Il recommande la saisine de la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye si Israël et le mouvement islamiste Hamas, qui contrôle Gaza, n'effectuent pas dans les six mois des enquêtes crédibles sur la manière dont le conflit a été mené.


Les résolutions de l'Assemblée générale n'ont pas le caractère contraignant de celles du Conseil de sécurité mais n'en ont pas moins un poids moral, car elle représentent les vues de la majorité des États du monde.


Israël, qui avait lancé une offensive en réponse à des tirs de roquettes sur son territoire à partir de Gaza par les militants palestiniens, juge le rapport Goldstone «inique, saugrenu et unilatéral».


L'État hébreu, qui a mené une campagne diplomatique tous azimuts contre le rapport et a vainement tenté d'éviter qu'il soit discuté à l'ONU, craint qu'il finisse devant le Conseil de sécurité puis la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye, qui pourrait engager des poursuites contre ses hauts responsables militaires ou politiques.


Son ambassadeur adjoint, Daniel Carmon, a demandé en séance aux co-parrains de la résolution quelle «autorité palestinienne» serait chargée de mener l'enquête «crédible» ainsi réclamée. «Sera-ce l'Autorité palestinienne qui a été évincée du pouvoir par le Hamas dans un coup d'Etat sanglant, ou bien le Hamas, qui est une entité terroriste?», a-t-il lancé.


Des négociations entre pays européens et arabes n'ont pas abouti à des amendements du texte dans le sens souhaité par les Européens, amenant la plupart d'entre eux à s'abstenir dont la France et la Grande-Bretagne. Les Européens objectaient à ce que la résolution «approuve» le rapport Goldstone, qu'ils estiment déséquilibré en défaveur d'Israël.


Ils s'opposaient aussi au passage prévoyant de saisir d'autres organes pertinents de l'ONU, dont le Conseil de sécurité.


Pour diverses raisons, ni les Européens, ni les Etats-Unis ni la Russie ne sont favorables à une action du Conseil de sécurité sur cette question, d'où l'abstention de la Russie.


Le représentant permanent de la Ligue arabe, Yahya Mahmassani, a déclaré que le vote constituait «un très bon résultat» et «une victoire pour la justice».